mercredi 22 septembre 2010

Improbable.

« Le berceau. Je dois achever le berceau! », dit-il en sanglot.

Ses mains suintaient de larmes. Le berceau devait être prêt pour le retour, l’arrivée de son fils! Ainsi se présentait à lui la seule salve d’espoir attendue depuis des lustres. Les lourds pas d’un Zeca assommé sonnaient le glas de sa déliquescence. Les rayons funestes d’un soleil étrange plombaient sur le berceau existentiel. On eut dit qu’il n’attendait qu’un oui pour brûler le tout. Le cœur remplissait ses devoirs physiques. La tête faisait croire autrement. Tout était serré. L’esprit fuyant – jours meilleurs, où êtes-vous?–, l’âme affligée et pantelante .

« Mais si… Mais si jamais elle ne revenait pas avec mon fils? », se questionna-t-il dans sa tête.

Il envisageait cette possibilité pour la toute première fois. Dans l’abattement s’évanouissait toute chance d’exaltation. Un sinistre orchestre jouait en continu le vacarme de ses frayeurs. Il n’en entendait que la rumeur essoufflée. Il courba le dos. Ses espoirs chimériques faillissaient rapidement. Il saisit le pinceau et enduisit de colle un bout de bois. Il suait. Les violons grinçaient en staccato, point d’orgue des cors. Délicatement, Zeca travaillait le bois pour son enfant. Par des coups secs, il tapa de son maillet de bois sur l’une des extrémités tout en appuyant l’autre contre le mur. Le chef, battant des bras violemment, dirigeait l’ensemble dans les enchevêtrements d’une fantaisie. Les trompettes hurlèrent alors. Les violoncelles gémissaient. Son cœur battait fort. Ses mains prenaient de l’assurance. Les joyaux du monde paraissaient ridicules devant ce berceau.

« Elle viendra, lui aussi. Je le sais. On ne s’est pas quitté pour rien. »

Bientôt, il pourrait enduire le berceau de cette belle peinture bleu ciel. Il avait ensuite l’intention de le déplacer près de son lit. Il consolerait son fils les nuits de terreurs nocturnes. L’orchestre plongea dans un calme. Les musiciens asphyxiaient.

« Berceau, je te peins pour mon fils. Tu pourras le porter dans ses rêves. »

Un moment s’écoula lentement. Les yeux figés sur l’ancre de son âme, Zeca parlait sous le couvert d’un soliloque apparent.

« Peut-être. Giselle, nous sommes séparés… Pour être plus forts? Je ne sais pas. Vous me manquez. Je vous manque? Je vous manque? »

Zeca déposa le pinceau sur la palette. Une pause. Largo. Ses doutes lui arrachaient des larmes pesantes. Dans les angoisses du destin, il mourait à lui-même. L’espoir s’éteignait. Il ne bougeait plus.

L’air ambiant se fit léger. Un temps seulement et les instruments crièrent plus fort. Il se remit à peindre. Le pinceau ayant parcouru le berceau en entier, Zeca sentit son cœur flétrir. L’orchestre joua plus fort. Il l’entendit jouer sforzando jusqu’à fortissimo, de rumeur à concrétude. Il ferma les yeux, se couvrit les oreilles de ses mains. Zeca vit alors la méduse et se figea dans les méandres de sa tristesse. Il se dressa devant le miroir.

« Maintenant, j’attends. Ils reviendront un jour! », d’une voix juvénile.

2 commentaires:

  1. Hey Lukas.. tu sais jaime vraiment comment t'écrie j'en lirais encore

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