mardi 25 octobre 2011

Concernant la gendarmerie grammaticale

Il y a le bon goût, les Beaux-Arts, les Belles-Lettres d'un côté et le séculier, le vernaculaire de l'autre.

L'idée que le langage courant soit à corriger par un gendarme de la langue française m'horripile, si bien que le blog d'Antoine Robitaille, du Devoir, me cause plus souvent qu'autrement un vertige, faible, dois-je dire.

Dans sa plus récente intervention, qu'on peut voir ICI, il essaie de raisonner l'expression "patente à gosse". Comme l'expression provient de la langue vernaculaire, le langage du quotidien, oral, l’orthographe fixe proposé ici ne trouve pas résonance dans l'idée de l'expression. La patente est un objet qu'on gosse par définition. Patente dans la famille de patenter, gosser, construire, créer de toute pièce, arriver à ses fins par le moyen de l'essaie-erreur. Ce sont mes définitions. Gosser comme on travailler le bois, c'est simple. M. Robitaille va à tâtons dans la langue et propose que le lexème "gosse" du syntagme "patente à gosse" se rapporte soit à couille ou à enfant. Il a probablement oublié que l'on peut dire "tu me gosses" qui, au Québec, joue dans les plates-bandes de l'expression équivalente "tu me tannes". On dirait des expressions des coureurs des bois. Au lieu d'essayer de juger la langue de chez nous, il faudrait accepter son évolution et surtout ses racines.

Ces coureurs des bois, dont beaucoup étaient des jeunes de l'élite anglaise ou française du Vieux-Montréal, qui s'en sont allés dans le Nord afin de fuir les réalités matérielles de la ville (ça, c'est pas moi qui l'invente). Imaginons donc des hommes de lettres qui s'en vont dans les bois, apprennent des langues amérindiennes qui seront la lingua franca entre Anglais et Français. Ces coureurs des bois francophones ont adapté leur langue à leur réalité concrète. Dans l'évolution de la langue, on perçoit parfois des sauts en avant, mais aussi des retours en arrière. Par ceci, je veux parler que le mot "patente" convie à toute sorte d'usages et que gosse n'évoque pas grand chose d'autre que le bois. Pourtant l'expression complète "patente à gosse" est comprise par quasiment tout l'ensemble des locuteurs du Québec et même plus.

Alors pour traduction, je suggèrerais d'abord que ce soit un Anglophone qui la traduise; un principe en traduction veut qu'on traduise d'une autre langue à la sienne. Et que ledit traducteur ait en tête l'idée du bois et du travail, ainsi que de la formule essaie-erreur qu'exige un futur brevet.

Sinon ben traduire, c'est trahir.

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